Aujourd’hui, le Musée Guimet s’engage et pose un geste fort en faveur de la liberté d’expression. À l’occasion de son prix littéraire, il a en effet choisi de distinguer Fang Fang, autrice chinoise placée en résidence surveillée et dont les œuvres font l’objet d’une censure désormais systématique dans son pays. Dans Funérailles Molles (trad. Brigitte Duzan et Xiaoqiu Zhang), elle aborde le sujet aujourd'hui encore tabou de la brutale réforme agraire menée dans les années 1950 par la Chine de Mao.
Le jury de la quatrième édition du Prix Émile Guimet de littérature asiatique, présidé par Aurélie Filippetti et composé de Pascal Bruckner, Guillaume Husson (délégué général du syndicat de la librairie française), Mathilde Tamae-Bouhon et Sophie Makariou, présidente du Musée Guimet, décerne ainsi à la romancière une distinction hautement symbolique de la part de cette grande institution française face à la répression subie par les intellectuels chinois.
Les œuvres Funérailles Molles ainsi que son journal de confinement à Wuhan, (Wuhan, ville close, Journal, trad. Frédéric Dalléas et Geneviève Imbot-Bichet) sont interdites en Chine.
A propos de Funérailles molles :
Autour des drames qui ont marqué la réforme agraire chinoise : Une puissante oeuvre littéraire qui traite de la mémoire et de l'oubli. Le roman Funérailles molles aborde le sujet sensible de la réforme agraire en Chine du début des années 1950, un des épisodes les plus meurtriers de l'histoire récente du pays, très peu traité dans la littérature chinoise en raison des tabous qui lui sont attachés et des traumatismes laissés dans la population.
Inspiré d'une histoire vraie, le récit part d'allusions voilées aux faits douloureux qu'une vieille femme a choisi d'enterrer dans l'oubli pour ne plus en subir le traumatisme répété, et se déroule au gré des tentatives de son fils pour les reconstituer, le tout conté par un narrateur extérieur qui tente lui-même de comprendre. Publié en août 2016 aux très officielles éditions Littérature du peuple, le roman a été bien reçu et n'a pas suscité de critique majeure jusqu'à ce qu'il soit couronné du prix Lu Yao, en avril 2017.
Il a alors fait l'objet de vives attaques de la part d'une frange ultra-conservatrice du Parti. Interdit mais continuant de circuler, il a suscité un vif intérêt et des commentaires très positifs de nombreux lecteurs et internautes chinois qui ont spontanément apporté leurs propres témoignages et observations personnelles. Ce roman apparaît comme un document littéraire aussi intéressant par le fond que par la forme.
Il dépasse le cadre de la réforme agraire chinoise pour livrer une réflexion toujours actuelle qui nous concerne tous sur la tentation de l'oubli et le devoir de mémoire dans un contexte où la vérité historique s'avère insaisissable.
Ce prix Émile Guimet s’inscrit dans une politique culturelle autour de la littérature au sein du Musée Guimet, avec de nombreuses initiatives et contenus sur les plateformes: la proposition d’une évasion à travers la lecture en ces temps confinés.
La cérémonie de remise du prix Emile Guimet s'est tenue, dans le cadre de La Nuit de la Lecture ce samedi 23 janvier 2021 à 20h, présentée sous forme d’un film vidéo diffusé sur les plateformes internet et sur le site du musée.
Le tout en présence de la Présidente du jury Aurélie Filippetti, ainsi que la présidente du Musée Guimet Sophie Makariou.
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