La réforme des commissions, impulsée par le Centre national du livre pour moderniser son fonctionnement attire l'attention du ministère de la Culture - organisme de tutelle, par ailleurs. Pour réaffirmer « son ambition pour le livre et la lecture en France », Aurélie Filippetti annonce qu'elle va intervenir dans le planning qui était prévu, à savoir une entrée en vigueur à partir du 1er janvier 2013.
Le 18/07/2012 à 11:15 par Clément Solym
Publié le :
18/07/2012 à 11:15
Jean-François Colosimo, président du CNL
« Depuis sa prise de fonctions, elle a tenu à rencontrer les professionnels du secteur, et à échanger en particulier avec les libraires, les éditeurs et les auteurs. Les enjeux qui touchent à ce secteur sont en effet majeurs et supposent un pilotage renouvelé de la politique du livre et de la lecture », explique le ministère dans un communiqué. À ce titre, la ministre souhaite que son établissement joue « une fonction de médiateur entre les auteurs, les éditeurs, les diffuseurs et l'ensemble des acteurs de la filière ».
La réforme des commissions du CNL fait parler d'elle depuis quelques semaines, alors qu'un collectif de poètes avait tiré la sonnette d'alarme, dénonçant la suppression de la commission Poésie du CNL.
Nous écrivains, poètes, et éditeurs soussignés, estimons vital le maintien d'une commission Poésie afin d'éviter la domination d'un genre sur un autre : enviée par les poètes et écrivains de la plupart des pays, l'existence de cette aide a permis à de nombreux éditeurs, qu'ils soient puissamment implantés nationalement depuis longtemps ou qu'ils vivotent en Province grâce au bénévolat, de publier des livres qui n'auraient jamais pu voir le jour sans elle ; elle a permis à des poètes de ne pas mourir dans le plus total dénuement, et ce n'est pas une image. (voir notre actualitté)
Le CNL avait répondu à ActuaLitté, assurant que les refontes des Commissions n'allaient absolument pas impacter la qualité des subventions apportées aux secteurs, et que les craintes étaient infondées. Toute cette réforme s'appuyait sur de multiples observations. Ainsi, « la Cour des comptes, par exemple, nous indique depuis des années que le Centre compte de trop nombreuses commissions - 18 en tout - et nous a demandé de faire quelque chose. De même, nous devions modifier les actuels dispositifs, au nombre de 35, pour rendre plus claire notre action. D'autant que certains dispositifs ne sont plus utilisés, et ce, du fait d'une accumulation au fil du temps ». Il fallait donc réformer, et l'approche allait se faire autour de six axes :
Des points qui articuleront au mieux l'action du CNL et en éclaireront les missions. D'autre part, « le président du Centre l'a dit à la Commission, l'a répété aux représentants de la pétition : cette réforme n'est motivée par aucune volonté d'économie, et le Centre n'a pas sacrifié le moindre secteur ».
Pourtant, un nouveau coup de semonce était envoyé, par la signature d'une autre lettre, réunissant 18 auteurs. « La réforme générale du CNL n'implique pas seulement la confusion des commissions théâtre, roman et poésie, mais encore la fin même des commissions dites thématiques, la dilution et la concurrence des décisions prises par un « cabinet fantôme » d'experts contractuels chargés de dire la valeur des dossiers et de la prescrire au nombre affaibli des représentants de chaque discipline dispersée », expliquaient-ils.
Et de pointe la manière « de réformer l'instance ». « Nulle concertation, nul débat de fond, n'ont eu lieu ». Ce manque de concertation avec les acteurs du marché du livre « a omis de se poser la question de ses possibles effets notamment dans un champ à l'économie spécifique et peu coûteuse tel que celui de la poésie. » (voir notre actualitté)
Finalement, un troisième coup frappait :
Le président du CNL a préparé une réforme de l'institution sans concertation avec les membres des commissions ou avec les milieux littéraires (écrivains, éditeurs, universitaires, libraires). Les orientations de cette réforme sont aujourd'hui connues, et elles contreviennent à plusieurs missions fondamentales du CNL qui nous sont chères : protéger les « marges de l'édition » (comme la poésie) de « la violence du marché », garantir la diversité de l'édition, veiller au principe d'égalité dans le traitement des dossiers. Ce qui aurait dû mener à une simplification du fonctionnement interne risque de produire paradoxalement des lourdeurs administratives, avec un dédoublement des instances de décisions (commission et collège d'experts). Ce fonctionnement supprimerait la nécessaire discussion autour des dossiers et aboutirait à des inégalités dans le traitement des demandes. (voir notre actualitté)
C'est forte de toutes ces observations que la ministre de la Culture a souhaité prendre la main sur le dossier et d'intervenir donc dans l'emploi du temps. La réforme « définie il y a quelques mois et qui devait entrer en vigueur au 1er janvier 2013 ne peut être mise en oeuvre sans prendre en compte les nouvelles orientations du gouvernement. Cette réforme étant par ailleurs contestée, une concertation préalable s'avère nécessaire ».
Et Aurélie Filippetti a donc demandé au président du CNL de « suspendre cette réforme ». « Des réunions de travail et une concertation seront organisées en septembre sous l'égide du ministère de la Culture et de la Communication. »
L'opposition entre la ministre et le président du CNL est donc actée. Celle-ci avait de toute manière mal supporté que le Centre communique sur la fin de 1001libraires avant le ministère.
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