#Roman francophone

Ma petite poésie ne connaît pas la crise

Jean-Pierre Verheggen

On râle, on bougonne, on ronchonne, on a ses manies, on "vieusit" mais, petit à petit, on se convainc qu'on peut rire de tout - y compris à gorge déployée ! - à condition toutefois de ne pas avaler son dentier ! Bref ! Avec humour et autodérision, insolence et truculence, on se dit que - poétiquement parlant ! : "Tout va très bien madame la Marcrise !".

Par Jean-Pierre Verheggen
Chez Editions Gallimard

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Genre

Poésie

À Romann,


Nour et

Florian, mes petits-fils.

 

 

I.


Commençons par défendre la poésie – fût-elle petite ! toute petiote ! – contre ceux qui la dénigrent ou la caricaturent, à l’oral comme à l’écrit…

 

 

Guacamole ? Quinoa ? Graines de chia, baies de goji, boulgour et tofu, tofu ? Serait-on invité avec Tintin et quelques « végétarés » à la table du général Tapioca ?

 

 

Oui ! Vous qui

 


crânez subtil,

patientez classe,

louvoyez courbe,

finassez virtuose,

souriez désinvolte,

musardez chafouin,

geignez doux,

phrasez supérieur,

objectez vif,

flagornez intense,

décrétez bref,

militez parallèle,

pouffez succinct,

larmoyez chic,

consultez peu,

écoutez neutre,

acquiescez convenu,

condescendez bon prince,

plastronnez sentencieux,

complimentez ample,

célébrez conquérant,

lénifiez sublime,

consentez chiche,

appréciez haut perché,

jugez sensible,

intervenez prolixe,

philosophez brillant,

improvisez cul-sec,

ratifiez officiel,

conseillez pointu,

séduisez bienséant,

esquivez large,

charmez rond d’jambes,

pérorez pontifiant,

fignolez bégueule,

 

… cessez donc de nous prendre de haut en cherchant à nous snober !

 

et vous aussi qui tronquez,

cisaillez, équeutez,

écourtez les mots, vous qui dites ou écrivez :

comme d’hab. – quand ce n’est pas cdab ! –

ou, j’en passe, actu. pour actualité

car ça bûcheronne en masse, sec et ras,

on coupe non seulement tout ce qui dépasse par le bout

mais surtout tout ce qui trop long à dire,

vous fatigue et vous contraint à rétrécir

pour mieux com. – com . – communiquer ! – cqfd.

 

ainsi naissent :

le raccourci mollasse,

le parler flagada,

le baratin sur les rotules,

le causé sans suite,

le phrasé couche-tôt,

le court toujours plus court

et le cours après,

le sociolecte-roi

(roi fainéant s’entend),

l’entendu conventionnel,

l’agrégé ès abréviation,

le jacté chiche,

le gagne-temps gagne-petit,

l’étêté du coccyx,

le sabir mis au parfum,

le bac à sable pour initiés,

le quiz sans peine,

l’espéranto ras des pâquerettes,

le chouia juste assez,

le codé basique,

l’énigme doigts dans le nez,

le mini minimorum flapi,

le rébus cousu main,

le scribouillard infantile,

le sténo allô maman sténo,

et le crypté paléolithique !

 

Allez vous faire déchiffrer ailleurs !

 

idem pour vous

 

lyriques geignards,

pseudo-marginaux 100 % académiques,

écrivains publics pour compliments de circonstance,

contemplatifs au bord des larmes,

grandes âmes démonstratives,

laudateurs à genoux devant vos propres écrits,

compulsifs du trémolo,

spécialistes du laïus à l’eau de rose,

bringueurs suisses,

adjoints au maire de Champignac,

speedés textuels secoués de spasmes déclamatoires,

épanchés sans retenue,

parodistes vous autoparodiant à votre insu,

tresseurs de lauriers courus d’avance,

rossignols prosodiques,

amoureux transis déclarant votre flamme la main sur le cœur,

récitants pour fancy-fairs et fêtes des mères,

inventeurs du fil à couper l’hémistiche,

génies locaux en extase,

contréfacteurs à l’eau de rose,

simplets pratiquant le simplisme rimé,

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04/05/2017 120 pages 14,50 €
Scannez le code barre 9782072729232
9782072729232
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